Syndrome de déficit en testostérone chez l’homme/ hypogonadisme

Définition

Hypogonadisme masculin (1)

L’hypogonadisme se caractérise par une diminution de la production de testostérone par les testicules ce qui peut entraîner une variété de symptômes physiques, psychologiques et sexuels. Parmi ceux-ci, on compte la perte de libido, le manque d’énergie, le manque d’endurance, la diminution de la masse musculaire, l’irritabilité, la perte d’intérêt, etc. Les premiers symptômes se manifestent généralement chez les hommes de 45 à 55 ans.

Andropause (2)

L’andropause, ou hypogonadisme tardif (late-onset hypogonadism, LOH), entraîne une diminution graduelle des taux de testostérone de 1% ou 2% par an chez les hommes à partir de 40 ans. Il n’y a donc pas de «pause» hormonale comme la ménopause.


Population à plus haut risque de souffrir d'hypogonadisme (2-3)

  • Diabétiques de type 2

  • Infection par le VIH avec perte de poids importante

  • Patient avec hypothyroïdie

  • Patient avec MPOC modérée à sévère

  • Patient souffrant d’ostéoporose et fracture de fragilisation

  • Patient souffrant d’obésité ou de syndrome métabolique

  • Utilisation de longue date d’opioïdes à action prolongée

  • Utilisation de longue date de glucocorticoïdes

  • Insuffisance rénale terminale


Le risque de d’hypogonadisme est d’environ 335 chez les patients obèses et diabétiques. Le mécanisme s’explique par la résistance à l’insuline et l’hyperinsulinisme réduisent les concentrations de globuline spécifique liant la testostérone (sex-hormone binding globulin ou SHBG), de testostérone totale et de testostérone libre). Cette baisse se fait principalement par une inhibition de l’axe hypothalamo-hypophyso-testiculaire. Quant à l’obésité, celle-ci engendre une diminution du taux de testostérone (2).


Critères diagnostiques (1-3)

  • Manifestations cliniques d’un déficit en testostérone (symptômes non spécifiques qui peuvent varier d’une personne à l’autre)

  • Niveaux sériques de testostérone sous les valeurs normales de testostérone fournie par le laboratoire (le dosage doit être fait le matin entre 7h et 11h). Selon le médecin du Québec 2020, il faut doser la testostérone totale à jeun le matin à au moins deux reprises. Il ne faut pas faire le test pendant une maladie aiguë.


Diagnostics différentiels (2-3)

Le diagnostic différentiel est important. Selon le médecin du Québec 2020, certains problèmes cliniques augmentent le risque d’un déficit en testostérone et doivent être inclus dans l’anamnèse. Leur dépistage est important, car certains causent un hypogonadisme dit «fonctionnel», qui est donc potentiellement réversible. Pour certains de ces problèmes, il faut avoir une forte présomption et chercher activement les symptômes. En voici quelques exemples :

  • Causes primaires organiques : Âge avancé, maladie auto-immune, Cryptochidie, Chimiothérapie, irradiation des testicules, Syndrome de Klinefelter etc.

  • Causes secondaires organiques :Tumeur hypothalamique ou hypophysaire, surcharge en fer, trauma à la tête etc.

  • Causes fonctionnelles : Médication, insuffisance rénale terminale, opioïdes, stéroïdes, hypothyroïdie, apnée du sommeil, dépression etc.


Causes médicamenteuses (4)

Certains médicaments peuvent avoir un impact sur les niveaux sériques de testostérone et pourraient engendrer des symptômes d’hypogonadisme.

Thérapie de remplacement de la testostérone (TRT)

Objectifs de traitement (1-4)

  • Améliorer les symptômes reliés au déficit en testostérone

  • Atteindre des niveaux sériques de testostérone normaux


Bénéfices potentiels du traitement (1-4)

Les données d’essais cliniques avec les diverses formulations en testostérone chez l’homme âgé (>65 ans) concernant l’efficacité et l’innocuité de ces produits dans le cadre d’un traitement de longue durée sont très limitées. Les répercussions sur le taux de survenue d’effets indésirables touchant la prostate et l’appareil cardiovasculaire, et les résultats ayant de l’importance pour le patient sont inconnus.


Le patient doit faire l’objet d’un suivi régulier (qui comprend l’évaluation des taux de testostérone sériques) afin que l’on puisse s’assurer qu’il répond bien au traitement.

Il n’existe actuellement pas de consensus quant au taux de testostérone approprié en fonction de l’âge. Le taux de testostérone sérique normal chez les jeunes hommes eugonadiques généralement accepté varie de 10,4 à 34,6 nmol/L (300 à 1 000 ng/dL). On doit toutefois tenir compte du fait que le taux de testostérone endogène (moyenne et plage) diminue normalement avec l’âge. (Le médecin du Québec 2020 suggère d’obtenir des taux de testostérone totale entre 14 nmol/l et 17.5 nmol/l pour le traitement de l’andropause).


Contre-indications relatives à la TRT (4-5, 8)

  • Hypersensibilité connue à l’un des ingrédients de la formulation du produit.

  • Cancer de la prostate (peut favoriser le développer ou la prolifération du cancer)

  • Cancer du sein chez l’homme (peut favoriser le développer ou la prolifération du cancer)

  • Homme avec désir de fertilité

  • Taux d’hématocrite supérieur à 54%

  • Insuffisance cardiaque grave

  • La femme enceinte ou qui allaite doit éviter tout contact cutané avec la zone d’application du gel de testostérone (même principe pour les timbres). La testostérone peut être nocive pour le fœtus. Une exposition à la testostérone au cours de la grossesse a été associée à des anomalies fœtales.


Mises en garde (1,3, 5)

  • MVAS et/ou MCAS (ex. AVC, Angine instable, Infarctus du myocarde, SCA) : augmente le risque de complications

  • Syndrome de Sjogren et Inflammation nasale non infectieuse : efficacité et innocuité non démontrée


Options pharmacologiques disponibles (4-8)

Peu importe la thérapie, on note généralement un début d’action en 6 à 12 semaines et une efficacité maximale du traitement après 3 à 6 mois.


Suivis (1-8)

En 2010, dans le volume 45, numéro 3 du Médecin du Québec, la recommandation au niveau du dépistage de l’hypogonadisme et de son suivi se résumait comme suit : ils peuvent se réaliser à l’aide du questionnaire ADAM modifié. Il n’est toutefois pas validé, et sa spécificité et sa sensibilité ne sont pas connues. Avant de débuter un traitement pharmacologique, le médecin devra effectuer un bilan de base qui conviendra une glycémie ou un HBA1c afin de dépister le diabète, les AST/ALT pour vérifier la fonction hépatique, une Créatinine pour évaluer la fonction rénale, un bilan lipidique pour vérifier le risque cardiovasculaire, la Prolactine pour éliminer une hyperprolactinémie, la LH pour aider au diagnostic, l’antigène prostatique spécifique (APS) pour dépister le cancer de la prostate, le SHBG pour faire le calcul de la testostérone biodisponible, la testostérone sérique pour dépister l’hypogonadisme et l’ostéodensitométrie pour dépister l’ostéoporose (élément en faveur de l’hypogonadisme).


En 2015, dans le CMAJ, les recommandations quant au suivi sont similaires, à l’exception du toucher rectal où la recommandation de procéder à cet examen avant de débuter le traitement, à 6 mois puis annuellement. Cette recommandation était considérée comme “faible” avec un niveau d’évidence modéré à faible. De plus, notons que le Médecin du Québec recommandait un suivi de la LH et l’HB (et non HT) à 3 mois, 9 mois puis annuellement. Cette recommandation semble être absente dans le CMAJ.

Toujours selon le Médecin du Québec 2010, Si le taux de LH est supérieur à 7 UI/l, il est fort probable qu’il y ait un déficit androgénique. S’il est inférieur à 0,1, le traitement est suffisant ou trop fort, il serait opportun de vérifier le taux de testostérone et si le patient est plus agressif ou fait de l’acné. De plus, on doit cesser le traitement si le taux d’APS augmente de 0,75 ng/ml ou plus après la première année de traitement et évaluer. Enfin, il est important de reconsidérer le traitement si le taux d’hématocrite dépasse 51 % ou si la concentration d’hémoglobine dépasse 180 g/l.


Au niveau du bilan hépatique, une référence suggère un suivi annuel pour la formulation orale seulement puisque cette formulation subit un premier passage hépatique, même si les perturbations hépatiques sont rares (7). Selon Fortin 2010 et Demers 2009, il est suggéré d’effectuer un bilan hépatique (ALT) avant le début du traitement, après 3 et 9 mois puis annuellement pour la préparation orale seulement. Le CMAJ ne semble pas discuter spécifiquement d’un suivi hépatique et Dugré 2020 ne semble pas en suggérer.


Effets secondaires (8)

Selon Dugré 2020, les produits de remplacement de la testostérone sont généralement bien tolérés à court terme, les principaux effets indésirables étant surtout liés à la forme utilisée. Ainsi, les produits topiques peuvent causer des réactions cutanées (éruption, prurit, vésicules), plus fréquentes avec les timbres qu’avec les gels ou les solutions. Le gel intranasal provoque l’apparition de rhinorrhée, d’épistaxis et de rhinopharyngite chez de 7% à 10% des patients. La forme orale entraîne des effets indésirables gastro-intestinaux. Les injections peuvent causer des réactions au point d’injection. Autrement, tous les suppléments de testostérone ont été associés à un risque accru d’acné, de rétention hydrosodée, de priapisme, de gynécomastie, de céphalées et de bouffées vasomotrices.


Utilisation de la TRT en présence d’anémie? (8)

Selon Dugré 2020, comme les suppléments de testostérone peuvent augmenter les taux d’hémoglobine (Hb) et d’hématocrite (Ht), leur utilisation pourrait être avantageuse chez les patients hypogonadiques et anémiques (Hb , 127 g/l). Cette hypothèse a été testée dans une analyse de sous-groupe d’un essai à répartition aléatoire comprenant 126 patients hypogonadiques et anémiques. L’application d’un gel de testostérone a corrigé l’anémie plus efficacement que le placebo avec un nombre nécessaire de patients à traiter (NNT) de 3.


Questionnaire ADAM modifié - modifiée par le Dr Yves Fortin - Médecin du Québec 2010

Une réponse positive aux trois premières questions ou à plus de cinq questions nécessite un bilan sanguin


  1. Éprouvez-vous une baisse de votre libido ? Oui / un peu / Non

  2. Éprouvez-vous une baisse importante de votre force musculaire et de votre endurance musculaire ? Oui / un peu / Non

  3. Éprouvez-vous fréquemment des bouffées de chaleur ou de la sudation ? Oui / un peu / Non

  4. Éprouvez-vous des douleurs ou des raideurs articulaires au lever du lit le matin ? Oui / un peu / Non

  5. Éprouvez-vous une baisse importante du nombre d’érections matinales ? Oui / un peu / Non

  6. Éprouvez-vous une baisse d’énergie ? Oui / un peu / Non

  7. Éprouvez-vous une diminution de la joie de vivre ? Oui / un peu / Non

  8. Êtes-vous triste ou maussade ? Oui / un peu / Non

  9. Éprouvez-vous une diminution de vos capacités sportives ? Oui / un peu / Non

  10. Éprouvez-vous une baisse de votre rendement professionnel ? Oui / un peu / Non

  11. Vous endormez-vous après les repas ? Oui / un peu / Non


Références


  1. Fortin Yves. Hypogonadisme masculin acquis. Le Médecin du Québec, volume 45, numéro 3, mars 2010. p. 27-32 (lien vers l’article en cliquant ici)

  2. Lajeunesse-Viens Guylaine. Andropause. Le Médecin du Québec, volume 55, numéro 5, mai 2020. p.29-33

  3. Morales A. et coll.Diagnosis and management of testosterone deficiency syndrome in men: clinical practice guideline. CMAJ 8 décembre 2015 187(18) 1369-1377 (lien vers l’article en cliquant ici)

  4. Up to Date - Testosterone treatment of male hypogonadism - version du 22 mars 2021

  5. Rx Vigilance

  6. Demers H. et Lapierre M. L’andropause y croyez-vous assez pour traiter? Le Médecin du Québec, volume 44, numéro 3, mars 2009. p. 75-79 (lien vers l’article en cliquant ici)

  7. Drouin Jean. L’hypogonadisme acquis Le Médecin du Québec, volume 45, numéro 3, mars 2010. p. 37-42 (lien vers l’article en cliquant ici)

  8. Dugré N. et Fillion M. Docteur, j’ai besoin de testostérone. Le Médecin du Québec. Volume 55, numéro 5, mai 2020. p. 35-39


Légende

  • > supérieur à

  • < inférieur à

  • inférieur ou égal

  • supérieur ou égal



Rédaction par Marie-Pier Lemieux, étudiante en pharmacie

Révision par Pierre-Olivier Hallé, pharmacien


Version du 10 août 2021